L’Audiencia Provincial de La Corogne condamne le capitaine à neuf mois d’emprisonnement pour un délit de désobéissance grave à l’autorité

Auteur
Comunicación Poder Judicial

COMMUNIQUÉ DE PRESSE - JUGEMENT ‘PRESTIGE’

L’Audiencia Provincial de La Corogne condamne le capitaine à neuf mois d’emprisonnement pour un délit de désobéissance grave à l’autorité

Elle relaxe les trois prévenus des délits contre l’environnement et dommages causés aux espaces naturels protégés

13/11/2013. La première chambre de l’Audiencia Provincial de La Corogne a décidé de relaxer Apostolos Ioannis Mangouras, Nikolaos Argyropoulos et José Luis López-Sors González des délits contre l’environnement, dommages causés aux espaces naturels protégés et dommages dont ils étaient prévenus. La chambre — constituée par Juan Luis Pía Iglesias (président), Salvador Sanz Crego et María Dolores Fernández Galiño — relaxe également Nikolaos Argyropoulos du délit de désobéissance dont il était également prévenu, et prononce expressément d’office les deux tiers des dépens.

En revanche, l’Audiencia condamne Apostolos Ioannis Mangouras, en tant qu’auteur pénalement responsable d’un délit de désobéissance grave à l’autorité, prévu et sanctionné par l’article 556, en liaison avec l’article 550 du Code pénal espagnol, à la peine de neuf mois d’emprisonnement et au paiement du dernier tiers des dépens, en déduisant le temps déjà passé en prison dans le cadre de cette affaire.

Motifs du jugement

Le jugement soutient que « personne ne sait exactement quelle a pu être la cause de ce qui s’est passé, ni quelle aurait dû être la réponse appropriée à la situation d’urgence provoquée par la grave panne du Prestige, mais personne ne peut nier la défaillance structurelle, et personne n’a pu démontrer dans ce procès où elle s’est produite exactement ni pour quelle raison ».

Selon le dispositif du jugement, sur le plan formel, des inspections ont été menées, sur le plan matériel, des réparations ont été effectuées et l’organisme ABS a certifié que le navire pouvait naviguer normalement, mais malgré cela, la défaillance structurelle n’est due qu’aux carences de la maintenance et du contrôle de la conservation du navire, qui ne répondaient pas aux vices qui pouvaient être observés directement, mais qui dépendaient d’examens techniques complexes qui n’ont pas été effectués avec le professionnalisme, l’efficacité et/ou la prudence nécessaires.

Pour les magistrats, tous les rapports techniques sont extrêmement vagues et imprécis, ce qui peut être déduit des termes littéraux de plusieurs de ces rapports. Et ceux qui cherchent à établir une cause concrète et demonstrable manquent de rigueur et consistent à mettre ce qui s’est passé sur le compte de vagues anormales, du bris/fracture d’un cloisonnement et de défauts de conservation. Le Prestige possédait tous les certificats et les documents exigibles pour naviguer légalement dans les eaux où il le faisait, et le contrôle était confié à l’organisme ABS. Si les faits démontrent que la structure du Prestige était impropre à supporter une navigation normale, et encore moins dans des conditions critiques, il est impossible de certifier honnêtement le contraire, c’est-à-dire qu’il apparaît des éléments rationnels attestant que le contrôle ou l’inspection ont été, pour le moins, inefficaces.

La chambre conclut que « s’il n’a pas été démontré que les prévenus voulaient couler le navire, ni qu’ils connaissaient ses défaillances structurelles et leurs causes, mais qu’ils se sont limités à assumer une navigation risquée dans des termes qui ne peuvent pas être qualifiésd’irresponsables, ni du point de vue strictement professionnel, ni du point de vue de la simple logique, il semble évident de conclure que les membres de l’équipage du Prestige accusés dans le cadre de ce procès doivent être relaxés de ce premier délit, car ils n’ont pas agit intentionnellement et parce que leur imprudence relative, si elle existe, n’a pas été efficace et n’a pas été démontrée à bien des égards et, surtout, en aucun cas elle n’a été grave, ce qui est un élément constitutif du fait punissable exigible » pour la condamnation.

L’autre accusation pertinente dans ce procès — tranche le jugement — est celle portée par de nombreuses parties contre le directeur général de la marine marchande, José Luis López-Sors González, à qui est attribuée la responsabilité de ce qui s’est passé pour avoir pris la décision d’éloigner le navire des côtes galiciennes, ce qui a favorisé le fait que le déversement de carburant du Prestige affecte une grande partie des côtes espagnoles et françaises de façon catastrophique du point de vue économique et de l’environnement.

Compte tenu de l’état de la mer et des conditions météorologiques ces jours-là et de l’état du Prestige, ainsi que sa proximité de la côte galicienne, il était sur le point de s’embourber sur cette côte, avec des conséquences concentrées mais très préjudiciables pour elle et son équilibre écologique délicat, de sorte que, tout comme avec la réaction du capitaine pour redresser le navire, presque tous les experts s’accordent à dire que la décision initiale d’éloignement était correcte.

« Les autorités espagnoles bénéficiaient en outre d’un conseil technique correct et plus que suffisant, même si, comme tout conseil de cette nature, il est susceptible d’erreur. Il n’a jamais été dit jusqu’à présent, ce qui aurait été la bonne décision à adopter ou le protocole à suivre dans le cas non négligeable où ces faits se reproduiraient ; et même aujourd’hui, après une longue instruction et un procès long et ardu, personne n’a été capable d’indiquer ce qui devrait être fait, en dehors de quelques opinions particulières plus ou moins techniques », affirme le jugement. Les magistrats estiment que « simplement, face à une situation d’urgence, après avoir reçu le conseil technique le plus rigoureux et compétent, une décision a été prise, discutable mais partiellement efficace, tout à fait logique et clairement prudente ».

Le capitaine accusé a reçu l’ordre plusieurs fois, de façon impérative et claire de procéder au remorquage, pour mettre en oeuvre l’ordre des autorités maritimes espagnoles qui avaient décidé que le navire devait être éloigné de la côte galicienne. Mais le capitaine accusé n’a pas observé ni respecté cet ordre, il s’y est dérobé, il a décidé de ne pas le respecter et de désobéir, sous prétexte qu’il devait parler avec son armateur, et il a fallu environ trois heures pour effectuer cette consultation.

Ce qui s’est passé c’est que, plus préoccupé par les conséquences économiques d’un remorquage qui était obligatoire, urgent et raisonnable, que par le fait de résoudre une situation d’urgence maximale, le capitaine a décidé, avec peut-être un certain assentiment de l’armateur, de ne pas obéir aux ordres légitimes qui lui ont été donnés de façon impérative, ce qui constitue une désobéissance claire et un mépris délibéré du príncipe d’autorité, également légitime, de l’autorité maritime nationale. En revanche, le mécanicien en chef n’a pas pu désobéir concernant le remorquage, car celui qui devait trancher la question était le capitaine.

La chambre affirme que « la responsabilité civile exigible ne peut pas porter sur les graves conséquences économiques du déversement de carburant du Prestige, ex articles 109, 110, 116 et concordants du Code pénal espagnol, tel qu’il ressort de la teneur littérale de ces dispositions, lorsqu’elles portent sur des dommages et préjudices résultant du fait ou sur la nécessité que les dommages et préjudices découlent du délit, de sorte que si seul le délit de désobéissance est attesté, il ne peut en découler ou celui-ci n’a pas causé les dommages dérivés du déversement du Prestige, indépendamment des énormes dommages et préjudices en grande partie attestés ».